Thomas Kloeckner était un jeune seconde ligne prometteur du centre de formation lorsque son destin a basculé un soir de juillet. Victime d’un Accident Vasculaire Cérébral massif, il restera 2 jours paralysé dans son lit incapable de communiquer avant que son père ne vienne lui porter secours. Le diagnostic est terrible. La nécrose d’une partie de son cerveau gauche ainsi qu’un gros hématome intracérébral le laissent entre la vie et la mort pendant plusieurs jours. Le choc est brutal, l’espoir infime, mais le courage, la volonté de se battre et l’accompagnement d’une famille présente et bienveillante réalisent des miracles déjouant tous les pronostics de récupération. 8 mois après son AVC, la parole est revenue après s’être tue, ses jambes le portent à nouveau et la partie droite de son corps gagne chaque jour un peu plus de mobilité. Voici le grand combat de Thomas…

 

Personne ne peut s’imaginer qu’un grand gaillard d’un mètre quatre-vingt-dix-huit pour 115 kg en pleine force de l’âge, pensionnaire des Espoirs de l’ASM (en compagnie de Benjamin Boudou, Killian Tixeront, Théo Giral ou Gabin Michet), peut voir son destin basculer en une fraction de seconde, et pourtant. L’AVC (accident vasculaire cérébral) frappe aveuglement, à tout âge, plus de 140 000 personnes par an en France. 10 % des victimes ont moins de 50 ans ; 30% d’entre-elles décèdent dans les 30 jours suivants représentant ainsi l’une des plus importantes causes de mortalité dans le monde. Pour Thomas, le drame survient le 17 juillet dernier. Gêné par une sensation « bizarre » dans le bras droit, il quitte la soirée estivale à laquelle il participait avec plusieurs copains du centre de formation pour regagner son domicile. Lors du trajet, la sensation désormais « désagréable » gagne la jambe droite. Il parvient toutefois à monter les 3 étages de son domicile, ferme sa porte (heureusement pas à clef) et réussit à se coucher, persuadé « qu’après une nuit de sommeil, tout reviendra en ordre ». Il ne le sait pas encore mais son corps paralysé par la maladie ne bougera plus pendant près de 48 heures. Ce week-end-là, son colocataire et coéquipier chez les Espoirs Baptiste Roucan est reparti dans le Cantal, Benjamin Boudou qui habite la même résidence n'est pas là … il est seul ! Immobilisé dans son lit, Thomas garde en mémoire cette longue attente « je ne comprenais pas vraiment ce que j’avais mais j’avais conscience de ne plus pouvoir rien faire, ni bouger, ni m’alimenter, ni parler. » Conscient du drame qu’il était en train de vivre, il s’accroche à l’espoir « que quelqu’un vienne l’aider ! J’étais sûr que l’on allait venir me sauver. »

 

« Se retrouver comme cela permet de tout relativiser. Lorsque que je m’endormais, je n’avais qu’un seul but : Vivre ! »

 

A une grosse centaine de kilomètres de là, à Moulins où ses parents Didier et Patricia passent le week-end, l’inquiétude grandit au fil des messages laissés sans réponse et des coups de fil basculés directement sur messagerie. A 19 ans, Thomas est responsable, un garçon sans souci qui ne fume pas, ne boit pas, motivé à l’idée de faire carrière dans un sport qu’il aime tant… « Une journée sans nouvelle, ça arrive, les jeunes ont besoin de liberté… ensuite ça devient préoccupant » raconte Patricia. Le dimanche, Didier multiplie les coups de fils et les étend à ses copains. Personne n’a de nouvelles. C’en est trop, il prend sa voiture et débute les recherches par son appartement. « Sa voiture est en bas, c’est déjà une forme de soulagement », reconnait le papa encore bouleversé au moment d’évoquer cette terrible journée. Après avoir monté les 3 étages, il trouve l’appartement ouvert, son fils étendu sur son lit, immobile et incapable de s’exprimer. « Thomas avait ses grands yeux ouverts et essayait de me faire comprendre qu’il ne pouvait plus parler. C’était très choquant », se reprend Didier. « Je ne réalisais pas ce qu’il se passait ou ce que Thomas pouvait avoir. J’ai prévenu, Patricia, ma femme après avoir alerté les secours. » Quelques minutes passent avant que les pompiers n’arrivent. Le temps est très long pour le papa qui questionne son fils « que s’est-il passé ? Tu peux tout me dire… » Thomas ne peut rien répondre et continue de montrer sa jambe. Les pompiers n’ont pas de réponse et font rapidement appel au SAMU, il ne faudra que quelques secondes au médecin pour comprendre. « Nous le prenons en charge, c’est très grave. » Le scanner passé aussitôt au CHU révèle un AVC ischémique avec une très grosse artère du cerveau gauche obstruée et impossible à déboucher en urgence, ainsi qu’un hématome comprimant le cerveau « sain ». Les séquelles sont terribles : Thomas est mutique, paralysé, le pronostic vital est engagé. « Nous sommes restés à ses côtés, Thomas s’est battu comme un fou pour passer, les minutes, les heures et cette première nuit cruciale qui a fait basculer les choses du bon côté. » Du côté de la vie à laquelle le seconde ligne s’accroche avec toute la détermination et la rage qu’il pouvait avoir sur le terrain. Rien n’est encore joué, le Docteur Pioche qui le prend en charge dresse un premier bilan glacial « Il est vivant, mais les espoirs de le voir reparler, sortir de son lit ou espérer revivre en autonomie sont minimes. » Chaque jour qui passe est un jour de plus pour Thomas et sa famille. Alors que le risque vital s’éloigne, il est déplacé dans un service de réanimation où il passera 15 jours. Dès ce moment, le caractère reprend le dessus alors qu’aucun son ne peut sortir de sa bouche et que le côté droit de son corps n’est plus qu’un poids mort, son esprit commande « Je voulais m’en sortir et je me suis juré de ne rien lâcher tant que je n’aurais pas récupérer tout ce que je peux ». Les progrès sont minimes, presque invisibles mais Thomas ne lâche rien, ne montre aucune faiblesse. Il sait que le rugby est fini mais la priorité est désormais ailleurs « Se retrouver comme cela permet de tout relativiser. Lorsque que je m’endormais, je n’avais qu’un seul but : Vivre ! »

 

« J’ai toujours dit et pensé que j’allais m’en sortir, je vais m’en sortir ! »

 

La réanimation terminée, il est transféré au centre de rééducation Clémentel. La bienveillance et l’amour de sa famille l’accompagneront durant les 4 mois de cette nouvelle épreuve où chaque petite victoire est inespérée. Boire, manger, retrouver progressivement la parole et bientôt une certaine mobilité… le tout grâce à des soins quasi continus sur la journée, auxquels la stimulation et les encouragements de la famille, Didier, Patricia et Charlotte, sa sœur, contribuent tout autant à la reconstruction de Thomas. Tout le monde fait bloc, toutes les énergies convergent pour remettre sur pied « le grand ». Les premiers sons reviennent, « Thomas chantonne la marseillaise durant le JO de Tokyo » : l’espoir renait. C’est la valse des kinés, des orthophonistes, des neuropsychologues, des ergothérapeutes qui rythme son quotidien jusqu’à l’hiver. Thomas a quitté son lit et même son fauteuil. « Nous sommes tellement fiers de lui » reconnait son papa qui fut son premier supporter au bord des terrains avant de devenir avec sa femme Patricia encore de meilleurs soutiens dans cette terrible épreuve. Théo Giral, Alexandre Vaz, Gabin Michet, Baptiste Roucan, Benjamin Boudou, etc… lui rendent visite accélérant encore la motivation de retrouver une partie de la vie d’avant « comme les Mc Do du dimanche » sourit-il. « La combativité développée sur les terrains et la chose qui me sert le plus aujourd’hui dans ce nouveau combat », reconnait Thomas. « J’ai toujours dit que j’allais m’en sortir et je vais m’en sortir ». Au fil des mois, et même si le quotidien est encore différent, l’autonomie revient progressivement, les progrès sont immenses à la hauteur de la volonté dégagée par l’ancien seconde-ligne clermontois qui malgré la difficulté d’une rééducation longue et fastidieuse garde constamment le sourire aux lèvres, dégageant une joie de vivre communicative dans un environnement où l’ambiance est légitimement lourde. Conscient qu’il ne fera plus jamais de sport « comme tout le monde » Thomas reste un passionné de rugby comme peut en témoigner le short siglé du logo de l’ASM qui porte lors de cette rencontre ou les regards fuyants vers la pelouse du Michelin lorsque son père expose le récit. Son objectif est d’ailleurs de passer un diplôme d’éducateur pour accompagner des enfants dans cette pratique « quand tout ira mieux » car tout ira mieux. En contact avec le comité d’Auvergne, dans lequel Didier à quelques entrées après avoir joué à Gerzat une trentaine d’années, les contacts sont déjà engagés. Ils se concrétiseront. En attendant, l’autonomie grandissante, le désir d’autonomie du jeune homme de 19 ans se fait sentir. Thomas vient de réussir la certification du permis de conduire, la voiture est réservée, il ne manque plus qu’à l’adapter à une mobilité droite encore précaire. C’est dans ce cadre et pour l’aider à ce financement que le club lui remettra l’intégralité de la bourriche de la rencontre face à Bordeaux (dimanche soir) et que ses copains ont lancé une cagnotte Leetchi (voir ci-dessous).

 

Le combat de Thomas est aujourd’hui celui de la plasticité de son cerveau et son pouvoir de compenser les zones nécrosées par l’AVC par de nouveaux processus de vascularisation de connexion et de compensation. Difficile de prévoir jusqu’où sa volonté, sa détermination et aussi les progrès de la médecine parviendront à compenser les dégâts de l’accident. Personne n’ira jusqu’à dire que la vie est la même qu’avant ce 17 juillet mais Thomas ne lâchera pas le combat et se bat pour « qu’elle redevienne tout aussi belle ».

 

Si vous voulez aider Thomas, pensez à la bourriche dimanche soir ou rendez-vous sur https://www.leetchi.com/c/pour-thomas-rbapnxm5

 

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