Déjà novatrice et à l’origine du protocole référent en France et à l’international dans la prise en charge de commotions cérébrales avec l’étude sur la protéine S100 publiée en 2010, Le Staff Médical de l’ASM Clermont Auvergne et le professeur Vincent Sapin (chef du service Biochimie et Génétique Moléculaire) lancent une nouvelle étude soutenue par les laboratoires Abbott sur deux nouveaux biomarqueurs prometteurs qui pourraient, à terme, faciliter et objectiver l’état de souffrance et de récupération du cerveau : la GFAP et l’UCH-L1 !

 

La Protéine Acide Fibrillaire Gliale et l’Ubiquitine C-Terminal Hydrolase L1 voici les noms complets des deux biomarqueurs sélectionnés par le Professeur Sapin du CHRU de Clermont-Ferrand dans cette nouvelle étude visant à démontrer une meilleure compréhension et détection des commotions cérébrales dans le Rugby.

Depuis plusieurs années et l’étude clermontoise sur la protéine S100, le dosage de ce biomarqueur est la référence dans la prise en charge des commotions dans le Rugby. « Mais la protéine S100 n’est pas assez spécifique en post match immédiat », explique le Dr Rémi Gaulmin « car elle est sécrétée à la fois par le cerveau mais aussi par la jonction neuro-musculaire après un effort. Ainsi, dans les premières heures qui suivent le match, il n’est pas possible de différencier la part cérébrale et la part musculaire. Ce n’est que la cinétique de retour à un niveau de base spécifique de chaque joueur qui témoigne de l’état de récupération du cerveau en cas de commotion avérée. »

Partant de ce constat, le professeur Sapin a cherché des marqueurs « plus spécifiques du cerveau et potentiellement utilisables dès la deuxième heure après le match ». C’est au CHU Gabriel-Montpied, devant la chaine de analyses sanguines fonctionnant 24h sur 24 pour analyser les 20 000 échantillons hebdomadaires des patients auvergnats dont son service à la responsabilité que cet expert mondialement reconnu nous en dit plus sur ces deux nouveaux candidats. « La S100 est un très bon biomarqueur que nous utilisons encore tous les jours dans la médecine d’urgence après des traumatismes cérébraux mais la Science ne cesse d’évoluer et ces deux biomarqueurs candidats présentent des caractéristiques encore plus adaptées aux sportifs. Globalement, la cinétique dans le sang est similaire. Lorsqu’il y a une lésion cérébrale, ces deux marqueurs sont libérés dans la circulation générale dans les heures qui suivent le choc mais il ne semble pas que son transfert sanguin soit influencé par le niveau d’effort contrairement à la S100 dont le dosage était ininterprétable vis-à-vis de la commotion dans les premières heures. De plus, il semble que ces marqueurs restent plus longtemps dans le sang ce qui pourrait donner une cinétique de retour au niveau de base plus précis orientant ainsi avec plus de précision le HIA3 (l’avis du neurochirurgien dans les jours et semaines suivant le choc). » Tout l’enjeu de cette nouvelle étude, soutenue par une aide des laboratoires Abbott dans le cadre d’un programme de soutien international, sera de démontrer la spécificité de ces biomarqueurs vis-à-vis des commotions cérébrales.

 

 

Trouver des biomarqueurs toujours plus objectifs et pertinents !

 

Dans la mise en œuvre de cette nouvelle étude de « biochimie personnalisée » précise le professeur Sapin, tous les joueurs ont été testés à la recherche de leur niveau de base avant le début de la saison afin de se soustraire à la variable « effort physique ». Ils seront ensuite tous testés sur un match « sans commotion » afin de comparer les niveaux des biomarqueurs à leur niveau de base. Enfin, l’étude qui se tiendra jusqu’à la fin de la saison 2022-23 suivra de façon systématique le dosage spécifique de tous les joueurs concernés par une commotion (avérée ou suspectée) afin d’en tirer des conclusions. « Pour l’instant, nous avons démontré que le niveau de base n’est pas augmenté par un match « physiologique » », précise Vincent Sapin, « il reste désormais à suivre les variations de dosage lors d’une commotion afin d’en tirer une significativité aussi bien dans le diagnostic que dans la phase de décroissance et de récupération. »

 

Afin d’accompagner l’étude clermontoise, les laboratoires ABBOTT mettront à disposition un dispositif compact de tests portable et réactif permettant de traiter les échantillons sanguins in situ. « C’est assez révolutionnaire », poursuit le Biochimiste auvergnat. « Avec le procédé Point of Care et des cartouches spécifiques sur les biomarqueurs, les dosages seront réalisés directement à l’ASM par Rémi Gaulmin. Cela permet d’avoir une réactivité importante et de l’autonomie vis-à-vis des tests dont nous resterons toutefois le support central pour les taux de bases et les données massives. »

 

Désolé nous ne trouvons pas l'image

Comme dans toutes les démarches entreprises par le club c’est bien l’intérêt du joueur et son intégrité physique qui sont visées comme l’explique le médecin des Jaune et Bleu. « Dans l’état actuel des choses, la difficulté est d’avoir des certitudes en post match sur les commotions « peu-évidentes ». Nous ne pouvons nous baser que sur le déclaratif du joueur et de ce qu’il veut bien nous dire. Dans les premières heures, l’interprétation du dosage de la S100 ne nous apporte pas beaucoup plus d’informations en raison de sa sécrétion extra-cérébrale et notamment musculaire, c’est pourquoi ces deux marqueurs beaucoup plus spécifiques représentent un espoir important dans les premières heures de prise en charge. » « C’est tout l’intérêt de la Biochimie, poursuit le professeur Sapin. Comme l’imagerie médicale et d’autres outils, l’aide et la fiabilité du diagnostic doivent être au maximum détachés de l’aspect subjectif ou émotionnel du patient et du médecin qui peuvent induire des erreurs. Quand on s’appuie sur des choses objectives, le diagnostic s’impose et la prise en charge n’est que meilleure. »  GFAP et l’UCH-L1 pourraient ainsi devenir de précieux alliés à la détection précoce des commotions cérébrales ainsi que des témoins fiables de récupération du cerveau après un choc. Ce sera tout l’enjeu de cette étude conceptuelle de preuves scientifiques qui pourrait comme pour la S100, être proposée, après validation, à World Rugby afin de complémenter au suppléer le précédent biomarqueur déjà étudié par le Professeur Sapin et l’ASM il y a quelques années.