En cette semaine du goût®, nous nous sommes intéressés à ce que les Jaune et Bleu ont dans leurs assiettes. Sous la houlette de Stéphane Walrand, le référent « nutrition » au club depuis 2006, les Auvergnats ont pris ces derniers mois des engagements forts envers l’agriculture locale, le territoire et les circuits courts afin d’apporter aux joueurs une alimentation plus bénéfique et adaptée à la pratique du sport de haut niveau. Des changements acceptés grâce à un adage immuable dans ce domaine « quand c’est bon, ça fonctionne ! ».

 

Comme tous les sportifs de haut niveau, les joueurs de l’ASM Clermont Auvergne ont des besoins et des demandes supérieurs à la population générale dans le domaine de la nutrition. Pour réguler ce domaine, Stéphane Walrand, professeur d’Université et praticien hospitalier en Biochimie, Biologie Moléculaire et Nutrition, impose les grandes lignes alimentaires des Jaune et Bleu et suit les joueurs tout au long de la saison. C’est lui qui détermine avec le Traiteur Montrognon les menus de la cantine où les Auvergnats se restaurent matin et midi, 4 fois par semaine. C’est aussi lui qui a entrepris la démarche de se rapprocher des producteurs locaux afin de favoriser des circuits courts augmentant ainsi les qualités nutritionnelles des produits consommés. « Notre démarche a été de lister les aliments de base : ceux que les joueurs consomment le plus et de chercher à optimiser la qualité de ceux-ci. » Stéphane a ainsi ciblé les produits laitiers (un producteur local à Gelles), les œufs (en provenance d’Aurillac avec la norme Bleu Blanc Cœur enrichie en Omega 3), la volaille (avec les Volailles d’Auvergne) les fruits et légumes (en provenance directe du Limousin) et le pain (une recette semi-complète « spécial ASM » fabriquée à l’ancienne avec un levain et une maturation de 18 heures par un boulanger du marché Saint-Pierre de Clermont). Derrière ce rapprochement territorial, le scientifique note un réel bénéfice nutritionnel. « Le goût reste la donnée principale lorsque l’on change une habitude alimentaire. Celui-ci ne doit pas être dénaturé afin que les produits ne soient pas refusés par les consommateurs. Avec les produits locaux, le goût est au contraire exacerbé puisque les produits sont récupérés ou cueillis à maturation. Ils ne passent pas dans les cabines réfrigérées de camions ou des muriciers (navires où les fruits et légumes finissent leur maturation durant le voyage) où ils perdent des vitamines, oligoéléments et micro-nutriments originels. Au niveau qualitatif, rien n’égal les produits locaux qui sont les plus intéressants au niveau nutritionnel. » 

A la recherche de « la densité nutritionnelle »

 

Manger local reviendrait ainsi à mieux manger … « évidemment » tranche Stéphane « car pour un même fruit, un même œuf, un même morceau de pain à un poids équivalent, les apports nutritionnels peuvent être très différents entre un produit qui a traversé les mers et océans et/ou suivi un processus de transformation industrielle et celui qui a respecté une maturation naturelle près de l’endroit où il va être consommé. Ce que nous recherchons est la densité nutritionnelle » (la quantité de nutriments d’intérêt, comme des vitamines, par gramme d’aliment). Les organismes des sportifs surconsomment certaines vitamines, sels minéraux et oligo-éléments, lesquels sont aussi perdus dans la transpiration, justifiant des apports optimisés dans une alimentation à forte densité nutritionnelle. Pour faire simple et pour un même besoin en vitamines par exemple, mieux vaut manger une pomme du Limousin à maturation que devoir engouffrer la même pomme cueillie vertes, et venant de loin …CQFD. Pour favoriser cette densité nutritionnelle, Stéphane implique également le traiteur Montrognon avec qui il travaille pédagogiquement afin de réduire la transformation des aliments. « Moins les aliments sont transformés, moins ils sont « agressés », meilleurs ils sont. Ainsi toutes nos salades sont préparées par le chef (Toutoune), nos cuissons sont optimisées, nous ne passons plus par des aliments industriels où les process nuisent à la qualité des produits ».

 

Pour Stéphane Walrand : les « calories vides » sont à proscrire !

 

L’alimentation des sportifs reste dictée par les apports de calories mais comme Stéphane l’explique « il y a calories et calories ». « Ce sont les calories qui sont l’essence des besoins énergétiques auxquels les joueurs sont soumis et leurs variations de poids jouent le rôle de balance. Si un joueur prend du poids : c’est que ses apports sont supérieurs à ses besoins et à ses dépenses, s’il maigrit : c’est l’inverse. Mais certains « mauvais aliments » n’apportent que des calories sans apporter de vitamines, d’oligo-éléments, etc… c’est ce que nous appelons les aliments « à calories vides ». S’ils sont trop présents dans l’alimentation des sportifs, ils restent transparents vis-à-vis de la balance mais les joueurs peuvent avoir des déficiences en minéraux ou en vitamines. Notre intérêt est de leur proposer des aliments qui répondent à la fois au remplissage énergétique tout en optimisant les apports en micro-nutriments et cela passe par la qualité des produits alimentaires et le goût ! » L’exemple des féculents complets (meilleurs en densité nutritionnelle) plutôt que les féculents blancs, fabriqués à partir de farine raffinée, illustre parfaitement cette volonté de manger mieux.

 

Et le goût dans tout cela ? « Il reste essentiel » précise le référent en nutrition des Jaune et Bleu. « Je vais prendre l’exemple de notre pain ASM. Depuis que nous avons mis en place ce nouveau pain, nous avons beaucoup de retours positifs…tous sur le goût ! C’est notre métier de proposer des choses bonnes pour leur santé et leurs performances, mais c’est leur choix de le prendre ou pas. Nous devons donc leur mettre à disposition des produits gustatifs pour qu’ils soient acceptés et consommés. C’est la même chose pour les produits laitiers, les fruits, les volailles, tout passe par le goût ! » Les habitudes alimentaires sont probablement les plus difficiles à changer et cela ne se fait pas ou plus sous la contrainte. Si le goût n’est pas au rendez-vous, les consommateurs (les sportifs comme les autres) retourneront vers des produits moins bons pour leur santé. « L’alimentation punitive…ça ne marche » précise Stéphane. « Le goût avant tout ! » … c’est la semaine idéale pour s’en convaincre.