Fabrice Ribeyrolles, l’architecte du projet sportif des Filles depuis maintenant 9 saisons a construit l’environnement propice au développement et à la constance qui a aujourd’hui installé les Filles de l’ASM Romagnat parmi les meilleures équipes de France. Avant de se déplacer à Toulouse pour affronter les Stadistes, Fabrice sait qu’il peut s’appuyer sur un état d’esprit exemplaire et d’un collectif fort : la signature des Filles de Romagnat.
Fabrice, vous allez disputer, samedi à Toulouse, votre quatrième demi-finale consécutive, l’ASM Romagnat est désormais installée dans les grands clubs de Rugby Féminin…
Nous n’avons pas fait qu’un exploit en 2021, nous travaillons depuis des années dans la continuité avec l’objectif d’aller même un peu plus loin que ces demi-finales. Avec Vincent (Fargeas, entraîneur) nous travaillons sur la durée avec nos joueuses et un recrutement ciblé qui nous permet d’intégrer des jeunes à haut potentiel. Nous avons également évolué dans le domaine de la préparation avec Simon (Thomas) qui est désormais à temps plein, avec Hugo (Chartoire) à l’analyse vidéo ou Jeremy (Jallut) pour les skills individuels. C’est la continuité logique de cette structuration du club qui nous permet aujourd’hui d’être dans le bon wagon du haut-niveau. Nous mettons des choses en place : elles payent. La récompense, c’est cette continuité dans la performance avec une quatrième demi-finale en 4 saisons. Maintenant, nous savons que nous venons de perdre les deux dernières, on sait pourquoi nous les avons perdues et il n’est pas question de revivre cela. Nous voulons passer à l’étape au-dessus.
Est-ce que tu as l’impression que les équipes qui affrontent aujourd’hui l’ASM Romagnat ont changé leur regard sur ton équipe ?
On fait partie des équipes les plus pénibles à jouer car nous avons un collectif fort. C’est notre identité et c’est ce qui ressort à chaque fois. Ce fut encore le cas face à Grenoble, en quart de finale, qui avait 6 internationales françaises sur le terrain alors que nous n’en avions qu’une (NDLR : la demie d’ouverture Lina Tuy). Le rugby que nous cherchons à développer repose sur cela en cherchant beaucoup de variation et d’alternance de jeu avec de la vitesse et du mouvement. Nous avons beaucoup de retours positifs de ce que nous proposons mais il faut maintenant qu’ils soient liés à nos résultats et notre parcours. On ne veut pas perdre en demi-finale et que tout le monde soit content. Nous ne pouvons plus nous satisfaire de cela.
Ce collectif est vraiment la signature de ton équipe. J’imagine que c’est une notion que vous cultivez depuis longtemps…
Nous avons cette base de travail depuis 9 ans et notre montée en Elite (en 2016). Notre état d’esprit sera toujours de beaucoup donner les uns pour les autres : c’est la base de notre sport et le socle de notre groupe. Nous sommes au milieu d’un système qui fonctionne même si on doit changer quelques filles parce que ce collectif passe devant toutes les individualités et cela même si nous cherchons chaque année à le renforcer avec de nouveaux très gros potentiels. Nous nous retrouvons chaque semaine avec cet état d’esprit de travail et de partage parce que ce sont nos valeurs aussi avec Vincent. Nous sommes persuadés que la réussite du groupe passe par ce travail, le courage et aussi le sacrifice dont font preuve les filles pour se donner les moyens de bien jouer ensemble. C’est ce que nous retrouvons sur le terrain avec une adhésion totale au projet et à ses valeurs depuis 9 saisons. On pourrait croire que les plus anciennes sont usées mais il faut croire que nous arrivons à renouveler cela pour embarquer tout le monde dans un état d’esprit qui porte ce groupe et leur permet de bien vivre ensemble. Les Filles ont d’ailleurs créé une association de joueuses, donc, en plus de faire bloc sur le terrain, elles vivent aussi très bien ensemble en dehors : c’est la force de toutes ces filles incroyables.
Nous sommes persuadés que la réussite du groupe passe par ce travail, le courage et aussi le sacrifice dont font preuve les filles pour se donner les moyens de bien jouer ensemble.
Si on revient sur la saison en comparaison avec les 2 saisons dernières où il y avait eu parfois quelques trous d’air, celle-ci a été particulièrement constante…
C’est une année intéressante pour nous car nous travaillons vraiment bien depuis le début de la saison avec une base solide des saisons passées. Effectivement nous avions eu des moments plus difficiles la saison dernière mais le groupe a su évoluer et grandir encore. Cette saison, à chaque fois que nous avons eu un match important, nous avons su le maîtriser, notamment sur les déplacements à Lille ou Bobigny qui pouvaient être des matchs pièges et que nous avons dominés par la qualité de notre jeu. Ce fut aussi le cas lors du quart de finale. Encore un fois, le travail et le vécu collectif payent. On se dit que nous avons des arguments à faire valoir face à Toulouse ce week-end.
Comment décrirais-tu cette équipe toulousaine ?
C’est une équipe qui peut cerner les points faibles de ses adversaires et sait bonifier la moindre erreur, la moindre maladresse ou errement défensif pour mettre au fond les occasions. C’est un peu comme les garçons finalement, ce sont des tueuses à sang froid, la moindre erreur est utilisée. Ce sera à nous de faire comme face à Grenoble : le moins d’erreurs possibles, d’être précis dans la conservation et dans la discipline. Elles ont des joueuses, comme Pauline Bourbon, qui mettent beaucoup de vitesse et sont capables de créer beaucoup de danger. C’est aussi un gros collectif. Elles ont l’avantage de jouer à Ernest Wallon, ça va être sympa : il y aura de l’ambiance.
Vous avez déjà vécu cela, lors de votre titre en 2021 face aux Blagnacaises sur leur pelouse…
On aime bien ce rôle d’outsiders, se retrouver seuls contre tous… et puis quand tu es coach le discours d’avant match et toujours plus facile comme cela (rires) !
L’engouement généré par les Filles depuis 2021 est-il toujours en phase de croissance et se nourrit-il encore ?
Oui, cela continue de s’entretenir et nous voyons de plus en plus de gens nous suivre. Nous avons toujours du mal à nous y faire mais beaucoup de gens viennent nous voir pour parler de Rugby féminin. Nous recevons beaucoup de compliments sur nos prestations, le niveau de jeu que nous sommes capables de mettre sur le terrain. Nous avons des supporters qui ont découvert le Rugby Féminin il y a 15 jours après le baisser de rideau face à Castres (lors du ¼ de finale du Championnat face à Grenoble) : ils étaient sous le charme ! La qualité technique, la justesse, la stratégie… Nous gagnons des supporters à chacune de nos prestations, c’est forcément très valorisant et positif pour le rugby féminin. Nous attirons de plus en plus de monde mais pour continuer à le faire il faut avoir des résultats. C’est eux qui attirent les Médias, les spectateurs, qui donnent envie de venir nous voir. Contre Grenoble nous y sommes parvenus, il faut désormais renouveler cela pour passer au niveau supérieur et prolonger la saison jusqu’au bout.